MO.CO. Hôtel des collections
accueille pour la première fois des œuvres de la collection de la Fondation,
selon une sélection guidée par l’envie d’un récit, à la fois territorial et
universel. Cosmogonies présente près de 110 œuvres (sculptures, photographies,
peintures et installations) de 37 artistes de générations différentes tels que
Frédéric Bruly-Bouabré, Cyprien Tokoudagba, Mallick Sidibé ou Chéri Samba mais
aussi Zanele Muholi, Ishola Akpo, Sammy Baloji ou Aïcha Snoussi.
Comme fil conducteur de cette
histoire, l’équipe curatoriale du MO.CO. a choisi la figure de Cyprien
Tokoudagba (1939- 2012, Bénin). Il peignait à l’origine sur les palais et les
temples, restaurait des fresques, créait des sculptures, répertoriant ainsi les
différentes divinités vaudou ou scènes liées aux Rois d’Abomey. Il transposa
ensuite ces mêmes motifs sur toiles, puis fut invité par Marie-Cécile Zinsou à
inaugurer la fondation en 2005. Les figures et symboles représentés permettent
d’ancrer son œuvre dans la transmission, celle d’une histoire, d’une culture,
dans une économie de moyens et de formes qui ouvre à l’universalité. Les
peintures de Tokoudagba illustrent également la porosité entre la réalité et le
surnaturel, entre le quotidien et la légende, ces cosmogonies qui mêlent magie
et réalisme.
Le parcours de l’exposition
décline cette capacité d’engendrer des mondes à travers sept grands thèmes :
alphabets et codes / intimité et mémoire / un air du temps / poses et mises en
scène / distance critique / légendes et symboles / métamorphoses.
Frédéric Bruly-Bouabré, Esther
Mahlangu, Kwesi Owusu-Ankomah et Emo de Medeiros ont tous constitué des
répertoires formels mêlant tradition et contemporanéité. Les coiffures mises en
valeurs par les photographies d’Ojeikere témoignent elles-aussi de
significations transmises par des codes, liées à l’intime. Avec Sidibé et
Keita, c’est un voyage dans cette intimité qui est proposé, avant que le regard
ne s’éloigne pour rendre compte d’un air du temps retravaillé en studio, allant
jusqu’à la mise en scène. La question de la frontière entre réalisme et cliché
est franchie avec les œuvres de Samuel Fosso qui se travestit pour mieux
caricaturer les typologies sociales en fonction des apparences. Les scènes de
la vie quotidienne peintes par Chéri Samba se teintent d’une même distance
ironique, dans le choix des scènes, mais aussi dans les commentaires souvent
ironiques qui les accompagnent.
L’homme contemporain a aussi
engendré un monde malade, et celui-ci est dénoncé dans les photographies de
Romuald Hazoumé ou les œuvres de Quenum, Mahama ou Baloji. Pour le transformer,
l’enchanter, ou s’en détourner, on peut alors se tourner vers les étoiles avec
Rigobert NImi, vers la mythologie avec Lilanga, ou faire confiance aux signes
magiques révélés par Hazoumé. Il existe aussi des formes de résistances
individuelles, d’invention de soi, de métamorphoses libératrices : c’est ce que
nous offrent les photographies de Zanele Muholi ou Rotimi Fani-Kayodé, les
sculptures de Seyni Camara, ou les dessins d’Aïcha Snoussi.